Devenir la Phalène d’argent

Deuxième partie – La création du costume

La Phalène d’argent, c’est l’histoire d’une aviatrice aventurière qui peine à trouver sa place dans la société. Elle préfère renoncer à l’amour des hommes pour pouvoir vivre ses passions intenses. Papillon de nuit, elle vole de ses propres ailes, jusqu’à atteindre les limites du ciel de verre. Lorsqu’elle tombe amoureuse et doit faire un choix, elle choisit de mourir pour sa liberté.

C’est le pitch de mon nouveau numéro, que m’a inspiré le film La Phalène d’argent, réalisé par Dorothy Arzner en 1933 (titre original : Christopher Strong). C’est l’aboutissement d’un travail qui m’a tenu très à cœur et d’un costume qui fut un joli défi à réaliser. Ainsi, pour terminer l’année et commencer la nouvelle, je vous raconte l’histoire de la création de ce numéro en trois articles.


Vous n’avez pas lu la première partie ? C’est par ici !

Les ailes

À l’époque où j’avais découvert Loïe Fuller, et lu son autobiographie dans la foulée de ma fascination pour cette artiste et inventrice géniale, j’avais profité de l’un de mes passages à Nippori pour acheter six mètres d’un satin blanc très fin. Au cas où. Un jour peut-être. On sait jamais, ce serait bien d’avoir de quoi coudre ce genre d’ailes. J’ai remercié la moi du passé, j’ai fait plein de calculs afin d’optimiser la longueur du tissu que j’avais à disposition (et qui s’avéra être finalement bien peu comparé à la longueur requise pour de la danse serpentine en bonne et due forme !) et j’ai assemblé les trapèzes de satin pour en faire une cape.

À la place du col montant que porte Katharine Hepburn dans le film, j’ai choisi de mettre une sorte de collerette froncée. Plus fluide et proche du corps, cela me laissera plus d’aisance pour danser et rendra aussi le costume plus facile à transporter. Ces considérations sont importantes pour l’usage que je ferai du costume, alors que ce n’est pas le cas pour l’actrice dans la scène du film.

L’actrice Katharine Hepburn dans La Phalène d’argent

On affiche souvent fièrement nos réussites sur internet – moins souvent les ratés cachés derrière le résultat. Lors de la réalisation du col, j’ai d’abord fait un premier prototype de test. Ensuite, j’ai fait un second col que j’ai cousu en prenant en sandwich directement la longue cape (les ailes) ainsi que la collerette. Sauf que je n’étais pas entièrement satisfaite de la coupe de la collerette et la manière dont elle tombait dans le dos. Alors j’ai défait le col et refait une autre collerette. Quelques jours plus tard, en testant différents mouvements de danse serpentine, je me suis rendu compte que ça n’allait pas : ni visuellement, ni au niveau du confort autour de la nuque.

Après de longues hésitations, j’ai finalement décidé de re-défaire le col et j’ai opté pour une autre stratégie. Sauf qu’il ne me restait plus suffisamment de tissu pour refaire encore une collerette. J’ai récupéré ce qu’il me restait du tout premier prototype et ajouté des finitions. Bon, ça n’était toujours pas exactement ce que j’espérais obtenir, mais ça ferait l’affaire – il fallait bien, j’étais limitée dans le temps.

Photo : Mac Harley, les Paris Follies de la Baronne de Pâname

Le corps

Après les ailes, il a fallu attaquer la tenue argentée moulante. Limitée par des contraintes de temps, d’argent et de confort pour danser (bon et de flemme aussi – un tout petit peu !) j’ai choisi de reproduire cette tenue dans un tissu stretch. Le lamé argent est superbe dans le film, mais cela aurait été beaucoup plus fastidieux à réaliser et j’aurais probablement dû vendre un organe pour me payer ce type de tissu.

J’ai mis du temps à comprendre la coupe, et je ne suis toujours pas certaine d’avoir tout compris. On trouve des photos de Katharine Hepburn dans son personnage de Cynthia Darrington qui semble être en catsuit, c’est-à-dire une combinaison complète et une séparation au niveau des jambes. Or dans le film, on ne la voit que dans une longue robe moulante.

En observant de plus près ces photos trouvées sur internet, je suis arrivée à la conclusion que ça devait être les deux à la fois, même si je n’en suis toujours pas certaine : une longue robe fendue qui s’ouvre sur les jambes, elles aussi recouvertes de lamé. La catsuit me plaisait particulièrement. D’autant plus que dans le film, Cynthia Darrington ne porte presque que des pantalons, ce qui est révolutionnaire pour l’époque et met en avant le caractère rebelle de cette femme qui n’en a que faire des normes sociales. J’ai donc opté pour la combinaison.

Enfin, j’ai fabriqué les antennes avec du simple fil de fer. Tout était prêt pour que je puisse revêtir mon costume de Phalène d’argent pour mes spectacles de décembre, à commencer par la soirée Paris Follies, dont le thème était : Metropolis et space fashion des années 1920. Ce fut parfait !

Toute la troupe des artistes à l’ouverture de la Paris Follies du 2 décembre 2023. Photo : Mac Harley

Dans le prochain et dernier article de cette « trilogie », je vous montrerai une vidéo et des photos des représentations sur scène de la fin d’année. N’oubliez pas de vous abonner à mon blog pour recevoir un e-mail lorsque je publie un nouvel article, et à très bientôt !

Lire la suite : L’envol de la Phalène d’argent

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